Clément de Bellefroid : L’abstrait comme horizon

Dans le paysage artistique belge, certains créateurs se distinguent par leur capacité à tisser des liens entre disciplines, à inventer des passerelles entre l’image, le son et la matière. Clément de Bellefroid en est un exemple singulier. Photographe, vidéographe et compositeur, il développe une œuvre où l’abstrait devient langage universel, au croisement du visuel et de l’auditif.

 

Trois jalons fondateurs

Si Clément pratique la photographie depuis plus de quinze ans, ce n’est qu’au fil de quelques expériences marquantes qu’il a pris conscience de son potentiel artistique.

  • 2017 : ses premiers pas dans la composition de musique électronique ouvrent une brèche dans sa sensibilité. Inspiré par des artistes comme ASC, Kimyan Law ou The Glitch Mob, il découvre la puissance émotionnelle du son et son lien intime avec l’intériorité.
  • 2022 : un voyage en Islande bouleverse son regard. En compagnie d’un ami photographe, il parcourt l’île en quête de paysages grandioses… mais ce sont les détails, les textures et les formes insolites qui captivent son objectif. De ce séjour naît une passion pour la photographie abstraite.
  • 2025 : une étape décisive. Clément parvient à unir ses trois disciplines — musique, photographie et vidéo — dans une même démarche, notamment à travers la macro, donnant naissance à une vision artistique cohérente et immersive.
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hollow earth clement de bellefroid
L’abstrait comme terrain de jeu

Loin des grands panoramas ou des scènes évidentes, Clément cultive un regard attentif aux détails invisibles.Que ce soit au détour d’une promenade, lors d’un vol en avion au-dessus des rivières islandaises ou face à une simple matière liquide dans son studio, il s’applique à observer ce que la plupart ne voit pas.

« L’abstrait laisse place à la beauté de l’aléatoire naturel », confie-t-il. Les textures de la nature : roche, glace, eau, lave,… deviennent pour lui matière brute d’un langage artistique viscéral, qui touche directement l’instinct et la sensibilité du spectateur.

 

Entre ciel et matière

Deux techniques l’ont particulièrement marqué ces dernières années :

  • la vue aérienne par drone, qui déstabilise notre perception habituelle et offre des paysages aux allures de peintures ;
  • la macrophotographie, qui révèle dans un objet banal des mondes insoupçonnés, presque cosmiques.

Ces explorations donnent naissance à des images énigmatiques, qui questionnent notre rapport à la réalité et brouillent la frontière entre photographie et peinture abstraite.

 

Héritage et influences

S’il cite volontiers des photographes comme Jan Erik Waider ou Benjamin Hardman parmi ses influences, Clément revendique une liberté totale : « Je ne suis ni photographe aérien, ni photographe macro, je suis photographe abstrait. »
Son art est aussi profondément belge dans son rapport au surréalisme. Fidèle à la définition de Magritte « être surréaliste, c’est bannir le déjà-vu » , il cherche sans cesse le « pas encore vu », l’angle inexploré, la surprise visuelle qui ranime notre curiosité.

Dans ce cheminement, il explore aussi l’idée d’unir ses disciplines : photographie, vidéo et musique dans des créations audiovisuelles comme le projet « Ōra », où textures visuelles et compositions sonores se rencontrent. Plus qu’un aboutissement, ces expérimentations témoignent de sa volonté constante de repousser les frontières de l’abstraction.

Son œuvre « Brain Network », née lors de l’éruption du volcan Meradalir en Islande (2022), en est un exemple marquant : image forte et esthétique, mais surtout souvenir intime d’une expérience où il s’est senti relié à la nature dans toute son intensité. 

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brain network photography by clement de bellefroid this is Not Belgium

Accès à cette oeuvre : https://www.thisisnotbelgium.be/fr/produits-belges/clement-de-bellefroid/brain-network

 

Émotions et intentions

L’art, pour Clément, est avant tout un retour à l’émerveillement. « Quand je produis une image abstraite, tout est nouveau. Chaque image me permet d’être à nouveau ébahi comme un enfant », confie-t-il. Cette quête de fraîcheur, de surprise, nourrit son style qu’il définit en trois mots : organique, inexploré, fin.

Son objectif n’est pas de délivrer un message politique ou sociétal, mais de susciter une connexion émotionnelle brute. Dans un monde saturé par la performance, il voit dans l’art un échappatoire vital, un espace de contemplation et de liberté intérieure.

 

Défis et convictions

Comme beaucoup d’artistes contemporains, Clément reconnaît que le monde actuel présente des défis : l’abondance d’œuvres, la difficulté de se démarquer, la montée de l’intelligence artificielle qui brouille les frontières entre création humaine et production générée. Mais il défend une idée forte : l’intégrité. « Trop d’artistes confondent inspiration et imitation. L’authenticité est au cœur de l’art. »

 

L’artiste belge, entre singularité et curiosité

S’il revendique un attachement particulier à la Belgique, Clément incarne une identité artistique tournée vers l’ailleurs, façonnée par ses voyages en Islande, au Pérou, en Jordanie ou en Irlande. Mais cette ouverture s’accompagne d’un ancrage : celui d’une tradition belge qui valorise l’étrangeté, l’insolite, l’écart par rapport au réel.

 

Une voix singulière

À travers ses photographies aériennes, ses macros envoûtantes et ses compositions électroniques, Clément de Bellefroid invente une expérience artistique totale. Une œuvre qui invite à ralentir, observer et redécouvrir le monde avec un regard neuf.

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Clément de Bellefroid libre le photographe belge de l'abstrait this is Not Belgium